De l’utilité des normes pour accélérer l'action climatique
Les normes peuvent apporter une valeur ajoutée à la politique climatique nationale et internationale. Voici comment.
La 27e Conférence des parties (COP27) à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) se tient à Charm el-Cheikh, en Égypte, du 6 au 18 novembre 2022. L’ISO et ses membres rejoignent les rangs des acteurs du changement mondial pour mettre en valeur les Normes internationales et montrer comment elles aident à matérialiser les engagements climatiques. Notre couverture de la COP27 offre une vue d’ensemble et des informations plus complètes sur les travaux de l’ISO dans ce domaine, avec des articles de fond ou des documents d’analyse portant à la réflexion.
Selon un rapport du GIEC de 2022 , si nous utilisons les politiques en place pour étayer une stratégie de plus grande ampleur, si nous recourons à des technologies et à des infrastructures permettant d’accélérer l’atténuation du changement climatique et si nous parvenons à faire évoluer les comportements dans les grandes largeurs…les émissions de gaz à effet de serre (GES) pourraient être réduites de 40 % à 70 % d'ici à 2050. Le « si » conditionnel est un « Si » majuscule, mais l’obstacle à gravir devient moins imposant si l’on comprend qu’il ne s’agit pas de réinventer la roue.
Il existe déjà une profusion de normes et de politiques qui peuvent servir, mais elles manquent d’analyse et de coordination. Il faudrait pouvoir identifier celles qui fonctionnent particulièrement bien, repérer celles qui font double emploi, et savoir comment mettre en avant celles qui présentent les meilleurs avantages/la meilleure résonance et en promouvoir l’utilisation.
Au DIN, nous avons coordonné une approche multilatérale pour lancer ce processus. La normalisation offre une plateforme qui réunit des acteurs de l'industrie, de la recherche, de la société civile et du secteur public pour discuter des sujets et activités à étudier dans l’optique de l'action climatique, établir les priorités, et amorcer ensemble les activités normatives pertinentes.
L'année dernière, nous avons lancé un projet axé sur l'Objectif de développement durable (ODD) 13, qui appelle tous les États à prendre d’urgence des mesures pour lutter contre les changements climatiques et leurs répercussions. Notre projet vise un double objectif : le premier consiste à identifier les normes internationales, européennes et nationales existantes susceptibles de contribuer à la lutte contre le changement climatique et le second, à réaliser, avec nos parties prenantes, une analyse des lacunes par rapport aux besoins, en cartographiant l’existant de manière à repérer les normes qui nécessitent une révision ou les domaines à approfondir dans les activités de normalisation.
Le projet est limité à un petit nombre de branches de l’industrie, mais l'intention est bel et bien de lancer des initiatives similaires dans d'autres secteurs. Grâce à l'ISO, nous disposons d'un bon corpus de normes, qui soutiennent toutes d'une manière ou d'une autre les ODD des Nations Unies.
Les normes comme base de référence
Les normes ISO impliquent de la rigueur, aussi bien dans leur élaboration que dans leur mise en application. Cette caractéristique intrinsèque apporte une valeur ajoutée, en offrant une solide base de référence sur laquelle les décideurs peuvent s'appuyer pour établir des stratégies et des réglementations en matière d'atténuation des changements climatiques. L’intérêt des normes ISO ne s’arrête néanmoins pas là. Voici plusieurs arguments en leur faveur.
En premier lieu, étant donné qu’elles reflètent l’engagement des nombreuses parties prenantes qui participent à leur élaboration, les normes sont universellement acceptées. Cet avantage ne doit pas être sous-estimé dans le monde actuel en butte aux fractures inégalitaires et à la contestation.
Deuxièmement, les normes ISO sont le fruit du travail d’experts dans leurs domaines et, pour une mise en application effective, le niveau de technicité des indications qu’elles renferment et les exigences de sécurité spécifiées sont en règle générale très élevés.
Troisièmement, étant donné la perspective multinationale de l’ISO – et des membres qui la composent – les solutions qu’elle propose sont harmonisées sur le plan international. Le DIN, qui est l'un de ses 166 membres, représente par exemple les intérêts allemands au sein de l’ISO. Ce troisième point, et le deuxième décrit au paragraphe précédent, ont pour incidence que, dans la pratique, une norme ISO représente, dans le monde entier, une seule et même exigence/référence rigoureuse.
Les normes ISO existent depuis 1951. Elles sont constamment mises à jour, révisées et affinées à la lumière de l'évolution des circonstances et des connaissances. Elles sont acceptées et, fait important, les gouvernements et les entreprises utilisent déjà quotidiennement les normes ISO relatives au climat.
Outre les normes, l'ISO produit également des outils, des repères et des lignes directrices, qui apportent un éclairage et un soutien supplémentaires inestimables. Pensez au temps gagné lorsque les bases d'une politique ou d'un ensemble de mesures ont déjà été posées.
L’engagement de l’ISO
L'ISO n'est pas un acteur passif dans les efforts d'atténuation du changement climatique. Après la publication d’une norme, l’ISO ne reste pas les bras croisés. Au contraire, elle engage le dialogue avec le secteur privé et les décideurs, et travaille d'arrache-pied pour soutenir les initiatives visant à établir les définitions et les concepts nécessaires pour progresser dans le sens de l'atténuation du changement climatique.
Lors de la COP27 en Égypte, l'ISO lancera une première version de ses Principes directeurs de la neutralité carbone. Reconnaissant qu'à ce jour il n'existe pas de définition unique universellement acceptée d'un concept aussi important que la neutralité carbone, l'ISO a canalisé son énergie pour soutenir les tentatives visant à clarifier cette notion et à trouver une interprétation commune, en utilisant un langage commun, sans lequel il est impossible de suivre les progrès réalisés.
L'ISO partage également les enseignements qu’elle a acquis. En tant qu'organisation fondée sur la coopération, la collaboration et le consensus, nous avons beaucoup appris en travaillant ensemble. Sur la base de nos propres expériences, nous recommandons aux décideurs politiques et aux chefs d'entreprise de créer un consensus avec toutes les parties prenantes, comme nous le faisons lorsque nous délibérons sur les normes. La cocréation de règles législatives, de normes et de modalités accréditées d’évaluation de la conformité pour atteindre un objectif politique contribue à la prise en charge et à la responsabilisation de toutes les parties.
Nul besoin de réinventer la roue
La réponse à la pandémie de COVID-19 met en évidence ce qui est possible – en l’occurrence, la mise à disposition remarquablement rapide et collaborative d'un vaccin – lorsque les réglementations et les structures existantes, l'expertise et le financement des gouvernements et du secteur privé, et les connaissances pharmaceutiques convergent.
Il faudra investir chaque année plusieurs milliers de milliards de dollars pour assurer la transition vers un monde durable neutre en carbone. Il est clair qu'aucun groupe d’intérêt particulier ne dispose des outils, de l'autorité, du financement ou de l'expertise nécessaires pour y parvenir. Au contraire, une approche véritablement collective est nécessaire, et la dynamique est déjà lancée, comme le montre l'insistance à faire participer le monde universitaire à la COP27.
Nous disposons des bases et des ressources nécessaires pour agir au niveau mondial. Il existe déjà beaucoup d’instruments politiques et de normes qui contribuent à l'atténuation du changement climatique, garantissant davantage de cohérence et fournissant des repères internationaux pour accroître l’impact des efforts mis en œuvre à l’échelon mondial. Il est de plus en plus clair que nous n'avons pas besoin de réinventer la roue, mais simplement de la redresser.